REPORTAGE. Autour de Caen, le padel « a relancé toute la vie de notre club »
À près de deux semaines du début de Roland-Garros et alors que les centres sportifs vont bientôt rouvrir, le padel poursuit son essor en France. Toute cette semaine, Prolongation vous fait découvrir cette drôle de discipline qui rend dingue les amoureux des sports de raquette.
ÉPISODE 1. Match des sports : padel vs tennis, c’est quoi le plus dur ?
ÉPISODE 2. ENTRETIEN CROISÉ. Alix Collombon et Jérémy Scatena, les n°1 français en padel, présentent leur discipline
ÉPISODE 3. Reportage dans des clubs de padel en France
ÉPISODE 4.ENTRETIEN. Arnaud Di Pasquale, le nouvel homme fort du padel en France
ÉPISODE 5. L’engouement incroyable autour du padel en Espagne
Il y a cinq ans, à Caen et dans ses environs, les amateurs de padel n’auraient pas pu trouver chaussure à leur pied, à moins de se munir d’une rame et d’accepter d’écrire ce mot autrement. Le paysage a bien changé depuis, avec onze courts à disposition sur trois sites différents, signe d’une demande qui augmente sans cesse et d’une offre qui mise sur le grand potentiel de cette discipline à la mode.
Si le soccer de Démouville avait été le premier à installer un cube en plexiglas, deux autres structures ont pris le relais depuis pour voir les choses en plus grand. Avec un dénominateur commun, celui de venir du monde du tennis, comme les trois quarts des pratiquants aujourd’hui en France. D’une balle jaune à l’autre, ils se sont découvert une nouvelle passion pour un sport « ludique, très accessible, collectif (il se joue forcément en double) et convivial ».
Pour la structure privée de Biéville-Beuville, c’était aussi une nécessité absolue. Connu et reconnu dans le tennis régional, l’un des premiers clubs du Calvados, né en 1968 et dans lequel « des gens de Deauville venaient jouer au départ », a saisi cette opportunité pour prendre un nouvel élan. « On a installé le premier terrain de padel en septembre 2017, parce qu’en restant 100 % tennis, c’était la fermeture assurée, expose Damien Jean, qui gère la structure en famille avec son papa Olivier et sa sœur Clara. On a supprimé un premier court de tennis. Très vite, au bout de quatre mois, il fallait réserver deux semaines avant pour jouer en soirée sur l’unique terrain de padel. On a donc eu le projet de passer à trois terrains et cela s’est concrétisé en mai 2019. »
Un investissement important
Laisser de la place au padel au détriment du tennis, sans oublier ce dernier, c’est l’équilibre qui permettait au club calvadosien de s’y retrouver avant la crise sanitaire. Sur 2 600 m² de surface, le bâtiment de Biéville arbore désormais plusieurs couleurs : le bleu nuit de ses trois terrains de padel, dont la surface a été refaite à neuf récemment, et le vert pâle de ses deux terrains de tennis et de ses deux terrains de badminton.
Avant les deux fermetures administratives successives, quelque 150 joueurs différents pratiquaient chaque mois le padel. L’investissement a été important (25 à 30 000 € par court et des travaux de terrassement), mais il payait jusqu’au début de l’année passée. Un troisième sport de raquette s’est immiscé dans la vie du club, pour le plus grand bonheur des gérants, des professeurs de tennis devenus aussi professeurs de padel, et des habitués ou des novices. « On est loin du côté feutré du tennis, on est davantage dans un sport hispanique, dans la joie et la bonne humeur, même lors des tournois, dont le format favorise la bonne ambiance, appuie Damien Jean. Cela a relancé toute la vie de notre club. Il n’y a pas photo. Il y a eu un alignement des planètes assez exceptionnel et la crise nous a coupés dans notre élan. Aujourd’hui, on a une lumière au bout d’un tunnel qui dure depuis huit mois. Cela aide à se remettre dedans. »
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— Big Little Sighs Sun Mar 07 04:14:01 +0000 2021
Le 19 mai, les écoles de tennis et de padel pour les mineurs pourront reprendre leurs droits, avant la réouverture au grand public le 9 juin. De ce terrain entouré de vitres, de cette raquette avec de multiples trous, les professeurs de tennis Olivier Jean et Gaspard Olivier-Martin n’avaient jamais entendu parler avant de recevoir une offre de formation de Padel Arena, déjà implanté à Rouen en 2017. « Ils y sont allés et ils ont trouvé ça génial, super ludique et accessible. »
Le charme a opéré et depuis, des courts collectifs à l’année pour jeunes et adultes ont été lancés, un troisième professeur a été recruté. Issu lui aussi du tennis, Marc Durieux fait partie du top 50 français de la discipline et « a amené une grosse dynamique ». « Il ne suffit pas de mettre des terrains pour que ça marche, prolonge Damien Jean. Ce sport gagne à être connu, la structure de Mondeville vient d’arriver et n’est pas dans la même zone que nous, cela va continuer à se développer. Cela va créer une émulation, ça ne peut être que positif. »
À Mondeville, justement, d’autres adeptes du tennis ont saisi la balle au bond pour vivre une aventure différente. Dans deux hangars de 2100 m² et 900 m², le départ quasi simultané de deux entreprises ont ouvert la voie à Padelshot. « On nous a présenté les trois investisseurs, ça a matché tout de suite, raconte Alexandre Maes, responsable de la structure avec sa compagne Déborah Joao. Ils avaient besoin de gestionnaires et de locaux, on avait besoin d’investissements (600 000 € pour un club Padelshot). On s’est tout de suite entendu sur le projet. »
« Que les gens arrêtent de confondre padel et paddle »
Dans un pays et, qui plus est, une région où le padel prend tout juste son envol, l’ambition est toute trouvée. « Le faire découvrir au plus grand nombre et que les gens arrêtent de confondre padel et paddle, dit Alexandre. Plus on va le démocratiser, plus les gens sauront que ce n’est pas un sport sur l’eau. C’est un objectif à atteindre (rires). » « Les banquiers ne comprenaient pas pourquoi on avait besoin de 3 000 m² avec dix mètres de hauteur sous plafond. Ils nous demandaient quelle était la taille de nos planches, prolonge Déborah. Cela faisait une heure qu’on était ensemble au téléphone et on ne parlait pas de la même chose. »
Depuis, un complexe est né et il a fière allure, avec six courts de padel, quatre de badminton, deux tables de ping-pong, un terrain de pétanque, un espace billard et un club house de 300 m². Un lieu convivial, en adéquation avec l’image renvoyée par cette discipline, au coeur du projet de Padelshot Mondeville. « Quand on voit que les gens ont le sourire, qu’ils nous disent « c’est génial » en entrant chez nous avant de nous dire « c’était vraiment génial » en repartant, on a tout gagné », résume Déborah. « Aujourd’hui, il y a l’avant, l’après, l’échange avec les gens et c’est vraiment ce qui a changé notre vie, enchaîne Alexandre, ancien entraîneur de tennis désireux de se tourner vers autre chose. C’est ce qu’on était venus chercher. On l’a trouvé sur trois semaines mais dès le 9 juin, on est partis pour de belles années. »
À peine ouvert, déjà stoppé, Padelshot n’a eu qu’un échantillon en octobre dernier pour estimer le potentiel de son projet. Suffisant pour constater que l’engouement existe et que le padel peut grandir de manière exponentielle, ici et ailleurs (1). « Lors des deux dernières semaines, les six terrains étaient réservés de 18 h à 23 h, alors que la communication n’était pas lancée, nos flyers pas encore partis. Ce n’était que du bouche-à-oreille. On ne s’y attendait pas et on a hâte que cela reparte sur les mêmes bases. Le padel est arrivé et la progression me paraissait plus évidente dans ce sport que dans le tennis. Ce qui m’attire, c’est qu’il est accessible à tous, qu’il est très facile à jouer. En étant prof de tennis, je vois bien que certains mettent deux ou trois ans à faire plusieurs échanges. Au padel, au bout d’une heure, l’échange est engagé. On est dans un sport mixte, qui se joue à deux. On peut jouer avec sa copine, sa sœur, ses parents. Tous les nouveaux pratiquants qui sont venus jouer nous ont dit qu’ils adoraient et qu’ils reviendraient. Cela motive encore plus pour la réouverture. On a construit un club et un espace de vie convivial, on veut que les gens aient envie de revenir après avoir passé la porte pour la première fois. On croit vraiment en ce sport et en son développement. »
« Une fois qu’on entre dedans, on n’arrive plus à en sortir »
Charlotte Villeminot ne dira pas autre chose. La gauchère partage aujourd’hui son temps entre courts de tennis et de padel. Recrutée comme professeure par Padelshot, elle a vu ce sport comme « un souffle nouveau », s’y est investie pleinement et vivra à la fin du mois de mai son premier rassemblement avec l’équipe de France à Perpignan, dans l’espoir de participer aux championnats d’Europe de Marbella (Espagne), là où le padel est roi, fin juin et début juillet.« J’ai découvert ce sport il y a cinq ans quand je passais la formation BE (Brevet d’État) tennis à Lille. Je ne connaissais pas du tout. C’était un peu notre échappatoire après la grosse journée technico-tactique sur le tennis. Le padel a pris une grande place. Une fois qu’on entre dedans, on n’arrive plus à en sortir. »
Alors que le padel est aujourd’hui bien implanté dans le sud de la France, plus près d’une Espagne qui compte 4 à 5 millions de pratiquants, le territoire souffre encore de zones blanches. La Normandie n’entre plus dans cette catégorie, mais la marge de progression de ce sport y reste importante. « L’idée, c’est de donner envie aux gens, leur transmettre des choses pour qu’ils se passionnent, faire valoir ce sport à travers la compétition, développe Charlotte Villeminot. Je fais partie de l’association Pad’Elles et il y a vraiment un gros manque de tournois à l’heure actuelle chez les filles, parce que les pratiquantes ont du mal à venir en tournoi. Ma mission, ici, c’est aussi cela. L’objectif de Padelshot, c’est de mêler loisirs et compétition d’un côté, femmes et hommes de l’autre. Et pourquoi pas développer une école de padel à l’avenir, c’est ce qu’on souhaite. On cherche à développer ce sport en partant des jeunes. »
L’objectif est aussi de développer la compétition à travers les tournois sur un week-end. Biéville-Beuville en a déjà organisé une grosse dizaine depuis 2018, Padelshot Mondeville compte se lancer dans les semaines à venir. Largement majoritaires aujourd’hui, ces clubs privés espèrent aussi un soutien à la hausse de la FFT, dont la nouvelle équipe fédérale a envoyé plusieurs signaux positifs à destination d’une discipline qui gagne en licenciés et qu’elle garde sous sa coupe. « J’ai la chance d’avoir pu jouer par le passé avec Arnaud Di Pasquale (nouveau Directeur de la mission padel à la Fédération française de tennis) à Biéville-Beuville, raconte Charlotte Villeminot. Avec Arnaud Clément, on les retrouvait sur des compétitions de padel dès le départ. Ils sont quand même dans le top 50 français et ils se sont bien pris au jeu. Ce sont des joueurs de tennis qui sont complètement tombés dans le padel et qui ont décidé de pousser cette discipline. Ils ont vu ce qu’il se passait dans les clubs et lors des compétitions, et ont donc vu aussi le potentiel à développer. Ils travaillent dur pour faire connaître cette discipline, car on a toujours une personne sur deux qui nous parle des rames et de l’eau. Grâce à eux, je pense que le padel va être plus connu en France, au moins dans le monde du tennis. » En attendant, la vie sur les courts va reprendre son cours le 9 juin.
À près de deux semaines du début de Roland-Garros et alors que les centres sportifs vont bientôt rouvrir, le padel poursuit son essor en France. Toute cette semaine, Prolongation vous fait découvrir cette drôle de discipline qui rend dingue les amoureux des sports de raquette.
ÉPISODE 1. Match des sports : padel vs tennis, c’est quoi le plus dur ?
ÉPISODE 2. ENTRETIEN CROISÉ. Alix Collombon et Jérémy Scatena, les n°1 français en padel, présentent leur discipline
ÉPISODE 3. Reportage dans des clubs de padel en France
ÉPISODE 4.ENTRETIEN. Arnaud Di Pasquale, le nouvel homme fort du padel en France
ÉPISODE 5. L’engouement incroyable autour du padel en Espagne
(1) Padelshot Caen a été le premier à ouvrir, avant Padelshot Saint-Etienne qui ouvrira ses portes début juin. À terme, une dizaine de clubs Padelshot existeront en France.