« Marre du Covid-19 » : de confinements en couvre-feux, le récit d’une France qui en a « ras le bol »

« Marre du Covid-19 » : de confinements en couvre-feux, le récit d’une France qui en a « ras le bol »

Après la peur et la colère, après la perplexité, les brefs retours à la normale, les espoirs vite douchés, c’est une sorte d’abattement poisseux qui s’est emparé du pays. Comme si cette pandémie de Covid-19 provoquait la même lassitude inquiète que les maladies chroniques, avec leurs hauts et leurs bas, leurs lueurs d’optimisme et leurs rechutes.

De confinements en couvre-feux, l’avenir prend des allures d’horizon sans fin. Au vertige de l’inconnu succèdent un sentiment d’usure, l’impression d’être ballottés à l’aveugle dans une énorme lessiveuse. Il y a ceux qui luttent pour tenter de garder le moral et ceux qui n’y arrivent plus. Ceux qui se sont installés dans le fatalisme et ceux qui s’impatientent. Tous voudraient bien savoir à quelle sauce ils seront mangés au moment où plane la perspective de nouvelles restrictions.

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En attendant, « tous serrent les dents », remarque une dentiste parisienne qui a vu éclore une épidémie de douleurs faciales chez ses patients. Eczémas, crises d’acné chez les adolescents, maux de dos, la situation n’est pas sans retentissement sur le physique et la santé des Français.

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Quant au moral, bien sûr, il en prend un coup. « Chez les plus fragiles, cela va jusqu’à la dépression, la désespérance, constate Antoine Pelissolo, chef du service psychiatrie de l’hôpital Henri-Mondor de Créteil (Val-de-Marne). On observe un véritable découragement, une difficulté à vivre sans les appuis habituels, les distractions et la sociabilité ordinaire. Beaucoup de gens sont sur la corde raide : il suffirait de peu pour qu’ils s’écroulent. »

Cet effritement du lien social est d’ailleurs l’un des grands motifs de plainte, autant que l’angoisse du chômage ou les difficultés du quotidien. Et d’abord la disparition des « bisous », ces petits échanges de rien du tout qui semblaient parfois si banals, presque mécaniques du temps où l’on pouvait encore s’en faire. Ceux qui vivent en famille se rattrapent, comme Marie, secrétaire à temps partiel en Ille-et-Vilaine : « On compense avec des bisous, des câlins, on recrée de l’affectif. »

Mais, pour beaucoup, le manque de contacts est lancinant, toutes générations confondues. Bernard, gardien d’une école primaire du 12e arrondissement de Paris, le dit avec simplicité : « On ne voit plus les sourires, on ne peut plus se serrer la main, même ma sœur je ne peux plus l’embrasser. C’est ça le plus dur. » Depuis quelque temps, la pause cigarette revient un peu plus souvent, s’étire un peu plus longtemps, pour pouvoir quitter « ce foutu masque ». Bernard l’avoue, il est « fatigué ». Au point qu’avec cette crise qui n’en finit plus il commence à « compter les jours » jusqu’à la retraite.

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