Comment évolue le dessin de bonhomme de mon enfant ?
A partir de quel âge un enfant commence-t-il à dessiner des bonhommes ?
"Pour le plus grand nombre des enfants, tout commence vers 3 ans, par le cercle. C’est déjà un concept de l’image corporelle qu’il commence à se faire de lui", estime Edwige Antier, pédiatre et auteure du livre "Mon enfant en pleine santé" aux Editions Eyrolles. L’enfant va progressivement yajouter deux traits pour les bras et deux traits pour les jambes, "c’est le 'bonhomme-têtard'", précise-t-elle.
Comment le bonhomme évolue-t-ilau fil du temps ?
"Vers 4 ans, l'enfant sépare la tête du corpsen superposant deux ronds. Les bras voient fleurir des doigts, mais le nombre n’en n’est pas exact. Les yeux entrent dans le rond supérieur, de grands yeux bien écarquillés. C’est pourquoi l’enfant a tant d’empathie avec Mickey, sa grosse tête, ses yeux grands ouverts, et ses mains à quatredoigts", éclaire Edwige Antier. Vers 5 ans, l'enfant commence à dessiner le cou pour séparer la tête du corps."La bouche arrive peu après avec un trait plus ou moins souriant. La chevelure va distinguer une fille d'un garçon", déclare la pédiatre avant de préciser : "Les petits garçons ont tendance à dessiner un trait entre les jambes. Il a conscience de son sexe". Les pieds commencent à camper le personnage. A 6 ans seulement, l’enfant dessine précisément cinq doigts sur chaque main. C’est plus tard qu’il dessinera un personnage de profil.
Qu’est-ce qui fait que l’enfant se perfectionne ?
"La conscience qu’il acquiert progressivement de soi. L’enfant met du temps à se sentir séparé de la mère. Les premiers mois, le nourrisson pense qu’il ne fait qu’un avec sa maman. Le sein qu’il tète est une partie de lui. D'ailleurs, s’il tète alors qu’il commence à parler, il dit: 'mon sein'! Le ventre de maman, ses seins: tout est rond, il est rond. Viennent ses yeux, avec ce regard qui scanne son environnement pour en comprendre les messages. Petit à petit, il se conçoit prenant les objets avec ses mains, se déplaçant avec ses jambes, puis parlant avec sa bouche, puis écrivant avec ses doigts…", indique Edwige Antier.
Faut aider l’enfant, le guider, lui montrer comment dessiner un bonhomme ?
"Vous pouvez faire vos propres dessins avec l’enfant sur les genoux en lui racontant des histoires. Ce sera lui raconter mais non lui apprendre. Car cela n’influencera pas son propre graphisme, qui est programmé comme la marche ou les dents!", conseille la pédiatre.
Y a-t-il des raisons de s’inquiéter si le dessin a du mal à évoluer ?
"Faire tracer une figure selon le modèle peut aider à vérifier que l’enfant a acquis les concepts de son âge (en moyenne le rond à 3 ans, le carré à 4 ans, le losange à 6 ans). Le dessin du bonhomme est plus complexe car il est également gouverné par les émotions. Je trouve dommage d’afficher les dessins des enfants en classe, ou de les offrir sur un torchon, avec le prénom de chacun, car cela conduit à des comparaisons et jugements totalement inadaptés de la part de parents!", considère-t-elle.
Faut-il lui poser des questions ? Lui faire raconter une histoire à partir de son dessin ?
"Il ne faut pas poser de questions, c’est une inquisition maladroite car l’enfant ne sait pas ce que vous attendez, et cela le trouble. Pas question de lui faire raconter une histoire, il faut laisser l’imaginaire de l’enfant libre de vos réactions", estime Edwige Antier. "En même temps, évitez de réagir en disant 'c’est très beau!', pendant que vous pensez à autre chose. Un dessin est une offrande qui mérite que l’on montre son intérêt: 'il a un gros ventre, on dirait qu’il a bien mangé?'. Vous pouvez également lui demander si son bonhomme 'est content aujourd’hui?'.
Un enfant qui fait de «beaux bonhommes» sera-t-il forcément meilleur en dessin que les autres ?
Pour Edwige Antier, la réponse est claire : "Absolument pas. Le dessin est l’expression d’une émotion. Hier une fillette voyant des dessins collés sur le mur de mon bureau m’a dit: 'moi, je dessine mal; ma sœur dessine bien !'. Je lui ai montré un auto portrait de Picassoet lui ai dit: "tu le trouves beau, ce dessin?", "Non", m'a-t-elle répondu. Alors je lui ai montré le tableau de La maternité de Picasso et je lui ai redemandé "Et celui-là ?". Elle m'a répondu "Oui, très beau".Alors, je lui expliqué que c’était le même peintre, que le monde entier aimait son auto portrait parce que c’est l’émotion qu’un dessin transmet. Voilà pourquoi je dis toujours aux enfants quand je leur tends une feuille: 'J'adore les dessins ratés!'"
Livre : Mon enfant en pleine santé du Dr Edwige Antier et de Marie Dewavrin aux éditions Eyrolles. Disponible ici.