Journée mondiale de la prématurité : "En tant que parents, on se sent impuissants"

Journée mondiale de la prématurité : "En tant que parents, on se sent impuissants"

Par Julien Munoz Publié le La Presse de la Manche Voir mon actu

Chaque année, en France, 60 000 bébés naissent prématurément en France (environ 165 par jour), soit plus de 8 % du total des naissances, sachant qu’on qualifie habituellement de prématurée une naissance avant la fin du 8e mois de grossesse.

La date du 17 novembre a été retenue en 2009 pour célébrer la première journée mondiale de la prématurité, à l’initiative de l’association SOS Préma et de la fondation européenne des associations de prématurés.

Cette journée internationale est avant tout l’occasion de parler des naissances prématurées, et recueillir des fonds pour améliorer la prévention de la prématurité, le suivi des grossesses et la prise en charge des familles.

À l’occasion de cette Journée mondiale, nous avons fait appel à vos témoignages… et nous avons reçu près d’une centaine de réponses de parents, dans la Manche, qui ont voulu partager leur expérience et leur histoire. Extraits.

À lire aussi

Stéphanie : « Vivre au jour le jour »

« Mes jumelles sont nées prématurées le 24 juin 2015 à 5 mois et 3 semaines de grossesse. Leur diagnostic était engagé dès la naissance. Les médecins nous ont dit dès le début qu’elles n’étaient pas viables et qu’ils ne pouvaient pas se prononcer,que cela allait être au jour le jour. C’est ce qu’on a fait, vivre au jour le jour pendant deux mois.

Mes filles vont bien maintenant, elles sont en bonne santé malgré un début difficile. Elles ont été si courageuses, se battant pour rester en vie. En tant que parents, on se sent impuissants, et c’est la pire sensation. Même si cela fait six ans, ça reste une épreuve dont on ne se remet pas. »

À lire aussi

Morgane : « Son corps était de la taille de ma main »

« Mon fils Nathan est né le 29 mai 2019, à 27 semaines et 6 jours. Il faisait 610 grammes et 24 cm. Son corps était de la taille de ma main, si fragile. Au fond de moi, je savais qu’il avait une force incroyable pour vivre. Pas facile de voir un petit bout avec autant de machines autour de lui.

Mon fils est resté 1 mois et 10 jours sous respirateur. Quand ses poumons ont commencé à fonctionner, quel soulagement pour moi.

Je remercie beaucoup le personnel de la néonatalogie de Cherbourg de m’avoir soutenu tout au long de cette période. Mon fils a maintenant 2 ans et demi, et c’est un petit garçon plein de vie. »

Quand ?

Célestia est née le 28 août 2021… 2 mois trop tôt. Son terme était prévu le 30 octobre. Sa maman Ophélie s'amuse parfois à dire que "ce bébé Halloween a préféré être un summer baby".Lors de l'hospitalisation de sa fille, la maman a trouvé du réconfort dans l'écriture. Cela donne un texte chargé en émotions, intitulé "Quand ?"."Quand ? C'est souvent une question que l'on nous pose, une question que l'on est tentés de poser. Quand sortira-t-elle de l'hôpital ? Quand sera-t-elle transférée à Saint-Malo ? Quand pourra-t-elle être alimentée au sein ? Quand pourra-t-elle respirer sans assistance ? La réponse, on l'a compris, les médecins ne l'ont pas, alors on a arrêté de poser la question. On a compris que c'était comme demander quand son enfant marchera ou parlera. Chaque bébé a son rythme, et il faut juste lui laisser le temps. Alors on vit au jour le jour, dans ce service qu'une maman a qualifié de capsule de transition ou bulle du temps. Souvent, on ne sait pas quel jour on est, ni quelle heure il est. Parfois on arrive à 7 h du matin car on s'est réveillés aux aurores, parfois on reste jusqu'au bout de la nuit car on a pas sommeil. Parfois on déjeune à 15 h et on dîne à minuit. Parfois on rumine. On se demande pourquoi ? Pourquoi nous ? Pourquoi on n'a pas eu le droit à une grossesse normale, à un bébé à terme ? On a l'impression que le ciel nous est tombé sur la tête le jour où on nous a parlé de menace d'accouchement prématuré, que c'est tellement injuste.Et puis, parfois, on parle avec d'autres mamans qui, les traits tirés, le regard fatigué, nous racontent leur histoire. Comme cette maman qui me raconte son parcours et comment safille née à 26 semaines est d'abord passée par le service de réanimation, qu'elle est hospitalisée depuis plus de 4 mois car elle a attrapé le covid pendant sa grossesse. Elle me confie aussi qu'il y a un an, elle a dû accoucher d'un bébé mort à cause d'une complication. Cette maman fragile, j'essaye de la réconforter comme je peux, avec des mots maladroits, et ma douleur semble soudain bien dérisoire. Je la vois toujours seule errer dans les couloirs, le regard dans le vide. L'hospitalisation de son bébé paraît alors être une douleur bien supportable face à la perte d'un bébé. Je me répète donc que Célestia va bien, que son état est stable, et que ce n'est qu'une question de temps. Le temps semble être une éternité. Les choses n'avancent pas aussi vite qu'on l'avait imaginé, mais chaque petit progrès nous met du baume au cœur.

À lire aussi

Lucie : « Personne ne nous avait parlé de la prématurité »

Journée mondiale de la prématurité :

« Auriane est arrivée le 25 décembre 2017, à 34 semaines. Ce fut un choc car nous ne nous y attendions pas, et personne ne nous avait parlé de la prématurité et de la perte des eaux (ni gynécologue, ni sage-femme). Nous sommes restés un mois en néonatalogie, et maintenant, Auriane va avoir 4 ans, et en pleine forme, malgré sa première année difficile. Sa naissance a été notre plus beau Noël. »

À lire aussi

Jessica : « La séparation dès la naissance a été très difficile à vivre »

« Notre fils Louis est né le 25 août 2021, à 32 semaines de grossesse. Nous avons eu du mal à voir notre fils branché de partout, avec l’oxygène pour respirer, et la sonde pour pouvoir le nourrir. Il faisait beaucoup d’arrêts respiratoires.

La séparation avec mon fils dès la naissance a été très difficile à vivre. J’ai accouché à Saint-Lô et mon fils a été transféré à Cherbourg, il n’ont pas pu trouver une place pour moi, je n’ai pas pu le voir pendant deux jours.

J’ai pu l’avoir en peau à peau sur moi, et on essayait de le mettre au sein, même s’il n’arrivait pas encore à téter. Mais le lien maman-bébé est venue ainsi. Quand il était en peau à peau, il était apaisé. »

Angélique : « Un prématuré a une force en lui qu’on ne peut imaginer »

« J’ai accouché d’un petit garçon qui s’appelle Logan, né à 29 semaines pour 1,190 kg et 38 petits centimètres, le 11 novembre 2018. Et là, nous entrons dans le monde de la prématurité, avec une néonatalogie au top du top, sans savoir qu’un prématuré a une force en lui qu’on ne peut imaginer. J’ai rencontré mon fils 3 heures après avoir accouché.

Il est resté un mois et demi en néonatalogie. Il est sorti pour la nouvelle année. Aujourd’hui, c’est un petit garçon plein de vie, avec son petit caractère ! »

Evie : « Aujourd’hui c’est notre combat, tout tourne autour de lui »

« Mon fils est né à 31 semaines le 29 mai 2018,à 1,120 kg. Un moment extrêmement difficile quand on ne s’y attend pas. J’ai fait un rejet les premiers jours, je ne voulais pas m’en occuper. J’avais tellement peur de le perdre que je ne voulais pas m’y attacher. Le poids ne faisait que descendre, et puis, quand ça a remonté, j’ai petit à petit réussi à m’en occuper, lui donner tout l’amour dont il avait besoin pour se battre.

À sa sortie, aucune séquelle apparente. Mais en grandissant… À 5 mois, opération d’une hernie. À 16 mois, le monde s’écroule en apprenant diverses malformations, surtout au niveau du dos…

Malgré nos relances, aucun médecin ne s’en préoccupe, nous ne somme pas écoutés. J’ai dû mettre en pause mon activité pour m’occuper de lui. Aujourd’hui c’est notre combat, tout tourne autour de lui. »

Ludyvine : « J’ai eu très peur de revivre tout cela à ma seconde grossesse »

« Mes garçons sont nés à 33 semaines, suite à une hospitalisation à 29 semaines pour menace d’accouchement prématuré. Les 48 premières heures ont été très angoissantes car l’un des bébés avait son pronostic vital engagé.

Ils ne sont restés « que » trois semaines en néonatalogie grâce à un bon poids de naissance, mais ces semaines nous ont parues interminables. Le retour à la maison est aussi très stressant quand on s’est habitué aux capteurs pour savoir si tout va bien.

J’ai eu très peur de revivre tout cela à ma seconde grossesse, et le fait d’avoir eu un bébé né à terme est ce qui m’a le plus aidée à ne plus me sentir coupable de cette précédente grossesse compliquée et de cette naissance prématurée.

Je tiens à remercier le personnel de la néonatalogie de l’hôpital Pasteur, je n’ai pas retenu les noms mais quelques visages, les paroles réconfortantes et les précieux conseils. »

Virginie : « des heures nos mains posées sur lui »

Le soir, nous rentrions avec difficulté. Nous appelions plusieurs fois par nuit.Quand il a atteint un bon poids et su respirer et manger seul, nous avons pu commencer à le ramener, en journée d’abord, puis pour de bon, après presque 4 mois de néonat.

Cet article vous a été utile ? Sachez que vous pouvez suivre La Presse de la Manche dans l’espace Mon Actu . En un clic, après inscription, vous y retrouverez toute l’actualité de vos villes et marques favorites.

Partagez

La Presse de la Manche Voir mon actu
Mots clés: