Pour ou contre : forcer les enfants à dire s'il te plaît et merci

Pour ou contre : forcer les enfants à dire s'il te plaît et merci

Par Clémentine Thiney
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“Bonjour”, “au revoir”, en passant par “s’il te plaît”, et “merci”, voici des formules de politesse que l’on apprend souvent très tôt à nos enfants. Mais est-ce vraiment utile de leur enseigner cela dès le plus jeune âge ?

Pour : Être bien vu par l’entourage

Imaginez un peu votre fierté : lorsque vous arrivez quelque part, votre bout de chou dit systématiquement “bonjour”, et précède tous ses souhaits d’un “s’il te plaît”. Tout le monde vous félicite : “Mais qu’est-ce que ton enfant est bien élevé !”. Car bien se comporter en société est un des objectifs de l'éducation. Pour certains, cela passe par les formules de politesse. En tant que parent, vous avez une forte pression, de la part de la société et de votre entourage. Vous avez forcément des moments de doute, et le fait que l'éducation de votre enfant soit validée et reconnue par les autres peut être très important pour vous. Néanmoins, Valérie Roumanoff, hypnothérapeute et autrice de livre "Il pique des crises, apaiser les colères de votre enfant grâce à l'hypnose" explique “On n’éduque pas son enfant pour les autres, mais pour qu’il soit autonome plus tard”.Pour ou contre : forcer les enfants à dire s'il te plaît et merci Pour ou contre : forcer les enfants à dire s'il te plaît et merci

Contre : Les enfants ne comprennent pas les mots de politesse

Dans son livre Pour ou contre : Les grands débats de la petite enfance à la lumière des connaissances scientifiques, la psychologue Héloïse Junier est plutôt contre cette injonction. Elle écrit : “Les mots de politesse qui sont pour nous une évidence, sont pour les jeunes enfants un ensemble de termes abstraits qui ne veulent pas dire grand-chose”. En effet, ils sont comme l’explique l’écrivaine, dans le concret et le physique : “Ils ne comprennent que les mots qui renvoient à des objets qu’ils peuvent manipuler (balle, camion, assiette), ou à des actions qu’ils ont pu expérimenter avec le corps (sauter, frapper, lancer)”. Toutefois, on ne peut pas matérialiser un “merci”, ou un “s’il te plaît”. Surtout qu’avant l’âge de quatre à cinq ans, l’enfant n’est pas “décentré” : “Il n’est pas encore en mesure d’attribuer à autrui des croyances et des intentions différentes des siennes”, donc il ne comprend pas ces formules. Alors, même s’il vous dit “merci”, quand vous lui servez son assiette, cela ne signifie qu’il a saisi le sens du mot : “L’enfant a simplement associé une action donnée avec un enchaînement de syllabe” affirme la psychologue.

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La théorie de l’esprit

Dans son livre “Pour ou contre”, Héloïse Junier évoque “la théorie de l’esprit”. Cela désigne “la capacité des enfants à comprendre le fonctionnement mental des personnes qui l’entourent”. En d’autres termes, il s’agit du moment où ils vont être en mesure de comprendre que les états mentaux des autres peuvent être différents des leurs. L’autrice explique que c’est une compétence-clé, pour comprendre par exemple l’humour, et d’autres subtilités, tels que les mots de politesse. Avant cette période-là, le forcer à employer les mots “magiques” n’aura selon Héloïse Junier “aucun sens sur le plan psychopédagogique. Cela a un seul mérite : faire plaisir à l’adulte !”.

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La politesse de l’enfant

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Ce n’est pas parce que votre bout de chou ne dit pas systématiquement “s’il te plaît” et “merci”, qu’il est malpoli ! “Les jeunes enfants sont polis à leur manière”, explique l’écrivaine. Elle poursuit : “Ils n’ont pas besoin de mots d’adultes pour vous prouver leur gratitude. Ils le font naturellement depuis qu’ils sont tous petits”. Comment ? “Ils vous sourient, vous caressent, attrapent votre bras, serrent votre main”, précise l’autrice. Parfois, ils vous offrent quelque chose de précieux, ce qui représente à leurs yeux un véritable trésor, comme un beau caillou qu’ils ont trouvé en allant jouer au parc. Valérie Roumanoff complète : “La politesse, c’est quelque chose qui est censé venir du cœur”. Et quoi de plus spontané qu’un grand sourire ?

L’apprentissage par mimétisme

Ce qui est important, ce ne sont pas tant les formules de politesse, mais plutôt la manière dont votre loulou va se comporter. En effet, il peut très bien en faire usage de manière mécanique, et pour autant être très malpoli. Bien se tenir à table, ne pas couper la parole, et surtout respecter les autres, tels sont des gages de politesse. Heloise Junier explique que pour certains parents, contraindre les enfants à apprendre ces formules, est une manière de “contribuer à leur éducation et surtout de leur inculquer les règles de savoir-vivre en société”. Mais il ne faut pas brûler les étapes, car la compréhension de ces mots par l’enfant dépend de leur développement cérébral, et non de leur bonne volonté. La manière la plus simple d’inculquer ces valeurs à votre bout de chou, et d’être vous-même poli ! “Les enfants passent une très grande partie de leur temps à nous imiter. Plus nous serons polis nous-même, plus nous allons leur transmettre cela”, affirme Valérie Roumanoff. De cette manière, cela lui permettra aussi de mettre plus de sens derrière ces mots. Car si vous ne vous adressez pas à lui de manière poli, il y a peu de chance qu’il le fasse avec vous et les autres !

Apprendre le respect

Pour conclure, nous pourrions donc dire que le principal est d’apprendre à votre enfant à respecter les autres. "Finalement, dire s’il te plaît et merci, c’est assez superficiel. Ce qui prime, c’est le respect de l’autre personne. On peut très bien dire “s’il te plaît” et “merci” et pour autant envoyer balader tout le monde”, affirme Valérie Roumanoff. L’écrivaine rassure également : “Il est inutile de vous mettre la pression pour que les enfants maîtrisent l’usage de ces mots dès la petite enfance”. En effet, les deux expertes sont unanimes : pour apprendre la politesse de manière durable et profonde, soyez polis, et montrez l'exemple !

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