Bethsabée Dreyfus, costumière de « Mytho » : « Nous portons toujours les mêmes vêtements. Pourquoi ce serait différent à l’écran ? »
« J’aime bien qu’il y ait le moins de costumes possible. » La phrase surgit au premier quart d’heure d’entretien, prononcée par Bethsabée Dreyfus dont le métier consiste justement à dénicher des costumes. Ne pas y voir une minimisation de son rôle ni une inclination à la paresse.
Plutôt un appétit pour l’uniforme : « Tintin, Astérix, Obélix s’habillent toujours pareil. Et nous, dans la vie, malgré nos placards pleins, portons toujours les mêmes vêtements. Pourquoi ce serait différent à l’écran ? Il faut juste trouver les pièces qui caractériseront le personnage : le bon blouson, le bon jeans, la bonne paire de baskets. J’avais vu, il y a des années, la série danoise The Killing : l’héroïne fliquette portait sur toute la saison seulement deux pulls. Génial ! »
Nourrie par ses références cinématographiques
Mytho, excellente série produite par Arte et aujourd’hui visible sur Netflix, écrite par Anne Berest et réalisée par Fabrice Gobert, regorge de ces personnages dont elle a défini les contours comme des silhouettes de BD. Soit une famille de la classe moyenne plongée dans un quartier pavillonnaire. Trois enfants : 10, 14 et 16 ans. Un mari disquaire aux élans adultères.
Et Elvira, interprétée par Marina Hands, mère fourbue par une vie routinière et une écrasante charge mentale, dont un bobard va adoucir le fardeau : à partir du moment où elle fera croire à ses proches qu’elle est atteinte d’un cancer du sein, ils seront tellement aux petits soins qu’elle devra s’enferrer dans son mensonge. Autour de la famille, une brochette de personnages secondaires fantasques : l’amie cartomancienne en décolletés pigeonnants ; le patron détestable en costume-cravate ; la voisine sectaire en cardigan passe-partout…
En lisant le scénario, drôle et cruel, envoyé par Fabrice Gobert dont elle a costumé tous les projets (les films Simon Werner a disparu… et K.O., ou la série de Canal+ Les Revenants), Bethsabée Dreyfus a, comme toujours, d’abord pensé en termes de références cinématographiques. « Patrick, le mari, avait quelque chose d’un quadra attardé des comédies de Judd Apatow ; Elvira, un peu du personnage de Toni Collette dans Little Miss Sunshine. En la benjamine, je voyais un croisement entre Drew Barrymore dans E.T. et Punky Brewster », raconte-t-elle, recevant sur sa terrasse parisienne par un samedi après-midi de juillet.
Elle bannit les vêtements trop tendance
Après Les Revenants, sombre série de fantômes, Gobert l’a poussée à redoubler de couleurs, d’imprimés – Elvira commence par porter des chemisiers fleuris, vestes à carreaux et jeans bootcut, avant de se blottir, à mesure qu’elle joue les malades, dans des joggings et sweats à capuche molletonnés. « J’ai aussi demandé à Fabrice le genre de films que les personnages regardent ; la musique qu’ils écoutent. Tout ça m’aide à les saisir. Il m’a guidée vers Julien Clerc pour Elvira, du rock de jeunesse pour Patrick, et Therapie Taxi pour les enfants. »
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