Dior Haute Couture : obsession broderie
Paris - Des tenues épurées agrémentées de broderies :Dior célèbre cet artisanat dans la collection haute couture présentée lundi àParis dans un décor multicolore, lui aussi brodé par des jeunes femmesindiennes.
« Je suis obsédée par la broderie, c’est très personnel, je suis italienne,une partie de ma famille vit dans le sud, j’ai tout le temps vu les femmesbroder, ma grand-mère, mes tantes, ma mère… J’ai toujours été fascinée,c’est tout un langage à travers lequel les femmes s’expriment », confie à l’AFPMaria Grazia Chiuri, directrice artistique des collections femme. Un body géométrique gris porté sur un collant noir avec des chaussettesgrises et chaussures noires, le tout moulant et brodé : cette obsessions’impose dès le premier look du défilé, comme si on avait brodé le corpslui-même.
Le savoir-faire est séculaire mais l’approche est innovante : on n’ornementepas les robes en les brodant, elles sont conçues entièrement par la broderie,pratiquement sans coutures.Après la dernière collection prêt-à-porter très colorée, celle-ci sedécline en grande partie dans des nuances de blanc et de gris. Les broderiesd’une extrême sophistication sont aussi monochromes, avec beaucoup de ton surton.
La silhouette s’allonge et se simplifie, s’éloignant de la ligne cintrée deDior vers plus d’épure. Dans le même esprit, les coiffures sont lisses, chignons bun ou carré, lemaquillage nude avec un trait de liner blanc sous la paupière inférieure.Les vestes sans doublures sont traitées en double face, une techniqueconsistant à ouvrir le premier tissu et à insérer l’autre dedans, faisantaussi écho à celle de la broderie.
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— Nikola Ilic Sun Jul 25 07:32:17 +0000 2021
380 brodeuses à Bombay
La palette sobre des robes contraste avec l’exubérance du décor multicoloreet saturé au musée Rodin, où se déroule le défilé qui met en lumière et faitdialoguer les artisanats français et indien. Le décor reproduit en broderies des œuvres du couple d’artistes indiensMadhvi Parekh et Manu Parekh, en mettant en valeur la dichotomiemasculin/féminin, l’art contemporain abstrait pour lui, naïf pour elle. C’est la troisième fois que le décor pour les défilés haute couture de Diorest produit par l’école Chanakya à Bombay (Inde), où les étudiantes apprennentenviron 700 gestes nécessaires pour devenir maître artisan, chose rare dans unpays où ce métier se transmet de père en fils.
Ces collaborations s’inscrivent dans la démarche féministe de Maria GraziaChiuri. Elle envisageait au départ de faire venir les brodeuses à Paris pourle défilé, un projet empêché par le contexte sanitaire. « C’est un honneur pour elles d’avoir cette visibilité internationale »,déclare à l’AFP Karishma Swali, fondatrice et directrice de l’établissement. Au terme d’une formation de 18 mois, elles mettent ainsi en œuvre cequ’elles ont appris. « C’est une opportunité incroyable dont elles ne pouvaientmême pas rêver », ajoute-t-elle.
L’installation au musée Rodin, qui sera ouverte ou public dans la semainesuivant le défilé, a été réalisée par 380 brodeuses pendant 3 mois. Une façon de plus pour Maria Grazia Chiuri de prouver que l’artisanat estun art et la haute couture un projet culturel international. De nombreusespièces de la collection sont également brodées dans l’école Chanakya. « Il est très important de parler de l’artisanat, c’est crucial pour lahaute couture. Nous devons montrer le lien entre le travail artistique etartisanal, ce dernier étant considéré comme moins important dans certainspays » comme l’Italie ou l’Inde, souligne-t-elle.
Pour Maria Grazia Chiuri, cette réflexion devient vitale depuis lapandémie. « Personne ne sait encore combien d’entreprises ne survivront pas àla crise et combien on perdra de capacités créatives. Ce ne sont pas desouvriers facilement remplaçables. Il est prioritaire pour Dior de lessoutenir », conclut-elle. (AFP)