« Ça fait du bien de voir des vieux heureux » : au bal musette des quais de Seine

« Ça fait du bien de voir des vieux heureux » : au bal musette des quais de Seine

Leur été s’étire d’avril à novembre. Depuis qu’ils ont trouvé leur repaire en extérieur au bon goût de souvenir des bals populaires, et où les visages sont démasqués depuis peu, il n’est pas question pour eux d’en perdre une miette. Ils ne disent plus leur âge, ou bien en sont fiers. Demain demeure la seule inconnue de ces anciens épris de liberté, bien décidés à embrasser le plaisir pur de chaque jour qui point.« Ça fait du bien de voir des vieux heureux » : au bal musette des quais de Seine « Ça fait du bien de voir des vieux heureux » : au bal musette des quais de Seine

La danse au corps, chaque samedi et chaque dimanche de leur été à rallonge, peu importe la couleur du ciel, ils se retrouvent sur le quai Saint-Bernard, en bord de Seine, dans le 5e arrondissement de Paris. Ici, ils disent habiter une vie qui leur correspond à nouveau, le temps d’une parenthèse enchantée. De 14 heures à 20 heures, côté jardin Tino-Rossi, au creux du petit amphithéâtre en plein air de l’alvéole dite « numéro 3 ».

Sur le sol de dalles lisses qui rend les pivots, pirouettes et flottements faciles comme sur un parquet de dancing, a lieu le bal populaire Rock et Musette, qui rassemble à nouveau et en moyenne 200 danseurs et spectateurs. Ce sont des vieux qui dansent la résistance.

« Ça fait du bien de voir des vieux heureux » : au bal musette des quais de Seine

« A notre époque, on dansait tout le temps à Paris, on allait au Moulin de la Galette, rue Lepic, on allait partout, la ville était plus gaie. » A 80 ans, Roland, « de la famille du rock », vient chercher ici « la nostalgie de l’après-guerre ». « Pendant les “trente glorieuses”, on avait le droit de vivre le mieux. Nous, on n’avait pas l’emmerdement de trouver du boulot, on n’avait pas de téléphone portable, on était plus libres de vivre vraiment l’instant, en quelque sorte. On faisait notre boulot – c’était sérieux hein, ça rigolait pas –, mais après on allait s’amuser au bal. » Habitant de Gournay-sur-Marne, s’il faut faire vingt kilomètres ou même cinquante pour danser, Roland n’en a que faire, « je vais où ça danse », affirme ce « drogué de danse » depuis plus de soixante ans, qui refuse de rester devant sa télé, « là où on vieillit trois fois plus vite ».

Souliers ailés

Elles, portent des sandales, des escarpins, parfois à hauts talons, des nu-pieds, des chaussons de danse, des petites ballerines. Eux, sont en mocassins, chaussures bateau, en baskets confort à bulles d’air. Leurs souliers à tous semblent ailés. Leurs pas sont maîtrisés depuis tant d’années que certains s’abandonnent à fermer les yeux, d’autres à regarder le ciel et balayer la Seine du regard, ou à parler, parler, sans cesser de danser ni de rire.

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