10-15 ans après, je redeviens Maman, qu'est-ce que ça change ?
Marianne MorizotJournaliste spécialisée en tourisme/gastronomie/bien-être/parental Publié le
Après une première grossesse entre 20 et 30 ans, il n'est pas rare d'avoir un second enfant plus tard, autour de la quarantaine. Comment gérer cette nouvelle maternité ? Que faire si on est davantage stressée ? Comment bien intégrer l'aîné(e) ?... On fait le point avec une psychologue.
- Grossesse tardive, désir d'enfant et motivations
- Bien intégrer le futur papa
- Annoncer sa grossesse à son aîné(e) : conseils de pro
- Future maman après 35 ans côté psy
- Les clés pour comprendre et gérer son stress
Avoir un second enfant plus de 10 ans après le premier, un schéma familial atypique ? Et pourtant, avec le boom des familles recomposées, les troubles de la fertilité, les aides à la procréation médicalement assistée, il n'est plus rare d'avoir un bébé autour de la quarantaine.
Catherine Pierrat, psychologue, confirme : "Il est devenu courant ces dernières années d’avoir un enfant de manière tardive 10 ou 15 ans après le premier". Plusieurs raisons sociales, économiques, médicales et psychologiques (conscientes et inconscientes) peuvent expliquer cette tendance :
Quelle que soit la raison première, avant de se lancer dans une nouvelle maternité, il est nécessaire de s'interroger et de bien mûrir sa décision. Elodie, qui a eu son premier bébé a 20 ans, et actuellement enceinte de son second, a mis 7 ans à se lancer avec son nouveau compagnon. "Je n'étais pas sûre d'en vouloir un deuxième pour plusieurs raisons : d'abord la séparation avec le papa de mon fils a été un traumatisme. Élever un enfant quand on est maman solo n'est pas toujours facile, même si on est bien entourée. Et puis surtout, je voulais terminer mes études. L’accomplissement professionnel est pour moi essentiel. Enfin, je m’interrogeais sur ma capacité à en avoir deux et à pouvoir tout lui donner : du temps, de l'amour et suffisamment de ressources financières".
Grossesse tardive, désir d'enfant et motivations
"Le désir d’une grossesse tardive pose la question essentielle : de quel désir s’agit-il ? Le désir de (re)devenir mère ou le désir d’avoir un enfant ?", rappelle la psychologue, avant d'ajouter : "En effet, d’autres motivations peuvent déclencher une grossesse tardive : la peur de vieillir, de ne plus être considérée comme une femme car la maternité est souvent associée à la féminité, l’ennui dans son travail ou sa vie en général, la relance du couple fragilisé, le syndrome du nid vide lorsque les aînés partent de la maison".
Mais il ne faut pas bien sûr oublier la motivation de base : avoir un enfant parce qu’on a vraiment envie de concrétiser l’amour du couple, de transmettre etc. Et c'est d'ailleurs cette raison qui a convaincue Elodie de sauter le pas. "J'ai trouvé l'homme de ma vie, le bon. Lui n'a pas d'enfant et est issu d'une famille nombreuse. L'an dernier, on a commencé à en parler. On avait envie de fonder une famille. A 35 ans, c'était le moment de prendre une décision. Cela étant, cela aurait été plus difficile d'avoir un enfant, sans compter la trop grande différence d'âge avec mon aîné de 15 ans, qui est encore à la maison. Je voulais qu'il y ait un lien entre eux, avec l'espoir que mon grand gagne en maturité. Par chance, je suis tombée enceinte rapidement".
Une fois la décision prise, et le test de grossesse positif, commence alors l'aventure de la maternité. Outre la surveillance médicale accrue au-delà de 35 ans, cette nouvelle grossesse peut aussi être déstabilisante dans l'esprit de la jeune maman. Il est alors important que le futur papa joue pleinement son rôle d'accompagnant. D'ailleurs, avez-vous pensé à rédiger ensemble un pacte des futurs parents ?
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TéléchargerTéléchargerBien intégrer le futur papa
Que cette grossesse soit pour lui une première ou pas, il est primordial de bien communiquer avec le conjoint, en évitant les maladresses. La première erreur est de faire référence à sa (ses) grossesse(s) précédente(s) avec son ex-conjoint. La comparaison avec le compagnon précédent ("lui, il est venu à chaque échographie !") peut être dévalorisante, vexante et blessante !
Il faut également éviter (si c’est possible) d’être suivie par le même médecin et d’accoucher dans la même maternité.
De manière générale, il est très important d’impliquer le nouveau conjoint à toutes les étapes de la grossesse, de lui faire (re)découvrir tout ce cheminement, même si ce n'est pas la première fois.
Ensemble, prenez le temps d'échanger sur vos ressentis, vos craintes, voire vos peurs vis à vis de l’accouchement, des premiers jours du bébé...
"Je me sens beaucoup plus soutenue par le papa et c'est essentiel pour cette deuxième grossesse. Et heureusement, il est zen", assure Elodie.
Une fois l'étape du premier trimestre passé et les premières craintes envolées, vient alors le temps de l'annonce.
Annoncer sa grossesse à son aîné(e) : conseils de pro
C'est aussi un moment clé de la maternité, qui peut être délicat, voire angoissant. Il est très important de faire l’annonce à deux (avec le papa) et de prendre un moment pour se poser et présenter l’arrivée du bébé, en étant prêts à répondre à toutes les questions. Il faut éviter de s’expliquer ou de se justifier. Il faut respecter et accepter toutes les réactions possibles : de l’enthousiasme à la colère !
"Puis une fois l’annonce faite, il faut éviter d’en parler en permanence au risque de ne plus être à l’écoute de l’aîné(e). Il ne faut pas que ce dernier se sente mis de côté, voire rejeté...Tout au long de la grossesse (et même après) il faut le rassurer et lui répéter que vous l’aimez !", souligne la psychologue.
Dans l’idéal, l’aîné(e) pourra être associé(e) au projet, ne serait-ce que dans l’installation de la chambre du bébé par exemple. Ainsi il/elle se sentira intégré(e) et non évincé(e), et ça l’aidera à se préparer aussi à son futur rôle de grand frère ou grande sœur et prendre sa nouvelle place au sein de la famille. "On a annoncé la nouvelle au grand frère au cours d'un repas. Il était content et se projette déjà avec le futur petit frère ou petite sœur, car on garde la surprise du sexe", témoigne Elodie. Après les annonces à la famille, et si on se concentrait sur soi ?
Future maman après 35 ans côté psy
Plutôt détendue ou stressée pour une deuxième grossesse ? Les avis divergent. Alors qu'Aurélie, jeune maman de 44 ans, avec une grande de 12 ans, a vécu 9 mois dans un état d'esprit plutôt cool, Élodie, de nature stressée, a dû gérer ses angoisses... en pleine période de covid ! "A ma première grossesse, j'étais insouciante. Mais là, c'est radicalement différent, j'ai tout oublié, c'est comme si c'était une première maternité. Dès le début, j'ai eu des petits soucis de santé et j'étais d'autant plus en alerte, qu'auparavant j'ai travaillé dans la presse parentale", confie-t-elle.
"En effet, chaque grossesse, tardive ou non, est différente que ce soit dans les premiers symptômes, les ressentis, l’état physique et psychologique, l’accouchement... Et puis, 10 ans, voire 15 ans après une naissance, les souvenirs s’estompent ou la mémoire fait preuve de distorsion en idéalisant ou en dramatisant l’expérience précédente", rappelle Catherine Pierrat.
Une chose est sûre : on n’est pas la même (future) mère à 20 ans qu’à 45 ans : le regard sur la vie est différent, on profite, on savoure sa grossesse car on sait que c’est certainement la dernière.
A 45 ans, une grande partie de la carrière professionnelle est faite et l’on peut se concentrer davantage sur sa grossesse.
Les moyens financiers sont en principe meilleurs et permettent d’accompagner la grossesse avec des soins physiques et/ou esthétiques et d’accueillir de manière confortable le bébé. On a une approche différente du développement de l’enfant à travers sa propre maturité. Elodie acquiesce "J'ai beaucoup plus conscience de ce qui se passe dans mon corps avec cette seconde grossesse. Mon bébé bouge aussi davantage, je lui parle. Alors que j'ai suivi une préparation basique la première fois, j'ai surtout apprécié cette fois-ci l'accompagnement personnalisé avec une sage-femme. J'ai eu le désir de faire aussi plein d'activités prénatales : danse, aquagym, yoga, sophrologie, haptonomie... Côté achat, c'est aussi très différent. J'achète moins du neuf et/ou de grandes marques. Je suis plus écolo, j'ai privilégié le bio, la seconde main, le qualitatif avec des matières écolos. Et pour l'accouchement, j'aimerais qu'il se fasse dans l'eau”.
Pendant les 9 mois de grossesse, il n'est pourtant pas évident de rester zen... même quand on approche la quarantaine.
Les clés pour comprendre et gérer son stress
Afin de travailler sur sa zénitude, il est important de connaître les raisons de son stress, qui peuvent être diverses et se cumuler :
Avoir un enfant tardivement ne se résume pas à une grossesse et à un accouchement : il va falloir accompagner cet enfant pendant au moins vingt ans et se projeter dans l’avenir ; cela peut aussi être source de nombreuses questions angoissantes :
En résumé, les enjeux psychologiques qui sous-tendent les maternités tardives sont très complexes. Ces grossesses peuvent être vécues plus difficilement que celles des femmes plus jeunes et en post-partum les interactions mères-bébés peuvent peiner à se mettre en place.
Aussi pour une grossesse sereine, il est préconisé de suivre la préparation à l’accouchement classique. Tout d’abord, les techniques évoluent (il y a vingt ans, on n’utilisait pas le yoga, la méditation ou la sophrologie... par exemple). Ensuite, les rencontres avec d’autres futures mamans et des professionnelles permettent des échanges et une "socialisation" de la grossesse. Enfin, la mémoire étant souvent sélective, il est bon de se rappeler les bases, les étapes de l’accouchement, la gestion de la douleur, l’allaitement ou non etc.
Cependant, si la communication avec le futur papa, les échanges avec votre gynécologue et/ou sage-femme ne suffisent pas à calmer vos angoisses, il ne faut pas hésiter à consulter un psychologue afin d’exprimer les craintes, voire les peurs autour de l’arrivée du bébé.
D'après Catherine Pierrat, "cette grossesse peut être aussi l’occasion de régler des conflits anciens, familiaux, les problématiques de relation à sa propre mère, d’autant que la grossesse entraîne une plasticité psychique qui favorise la réactivation de fragments du préconscient et de l’inconscient qui reviennent plus facilement à la conscience et facilitent donc un travail thérapeutique".
Témoignage d'Aurélie 44 ans : un changement de vie et une deuxième fille
"J'ai eu ma première fille, Lola, à 32 ans et je me suis séparée de son papa trois ans plus tard. Je vivais alors en région parisienne et je n'étais pas prête à me remettre dans un projet de famille. Je me suis concentrée sur ma vie professionnelle et le bouclage des fins de mois comme on dit. Les années ont passé, et un jour (on peut dire quand je ne m'y attendais plus !), j'ai rencontré mon compagnon actuel à plus de 40 ans et lui tout juste 50. Nous avions chacun eu notre lot d'épreuves personnelles (séparations, accidents, découvertes de nos personnalités atypiques...). Mon compagnon démarrait un traitement pour une tumeur au cerveau et nous avions un projet de transition vers une vie à la campagne. L'envie d'enfant est apparue assez rapidement pour moi, comme une évidence. Je n'osais pas lui en parler car il qui avait déjà une fille d'une vingtaine d'années et un garçon adolescent, mais il a accepté mon désir et m'a dit que cela avait du sens. Nous avons eu l'impression que cette petite vie devait arriver dans notre couple, et que cela ne dépendait pas de nous...
J'ai fait 3 fausses couches avant d'avoir ce deuxième enfant : je n'avais pas de problème de fertilité, mais les embryons ne tenaient pas ! Je ne me suis pas mis la pression, j'ai simplement attendu et on m'a prescrit de la progestérone. C'est après un déménagement et deux saisons de travaux intensifs dans notre maison à la campagne et au potager que je suis tombée enceinte.
Autrefois citadine et très active professionnellement, avec une vie sociale bien remplie, j'ai vécu ma deuxième grossesse dans un cadre de vie aux antipodes, à la campagne, en exerçant un métier à temps partiel, avec très peu de sollicitations et aucun stress. Et surtout, avec un regard beaucoup plus profond et mature sur la vie. Durant toute la grossesse, je n'ai fait qu'écouter mes ressentis, mes envies, mené une vie très saine au grand air, travaillé auprès d'enfants - c'est d'ailleurs sur la table d'une salle de classe que j'ai trouvé le prénom de mon futur enfant, qui était gravé dans le bois !
Je n'ai fait aucune préparation et j'avais même le secret espoir d'accoucher le plus naturellement possible. D'ailleurs, j'étais tellement zen que j'ai géré une grande partie de mes contractions à la maison et suis partie à l'hôpital assez tard : ma fille est arrivée en 45 minutes, sans péridurale.
Aujourd'hui, en tant que jeune maman, je me fais davantage confiance, je suis moins à cheval sur certains "principes" de maman parfaite qui doit assurer sur tous les fronts. De plus, le papa est quelqu'un sur qui je peux compter quotidiennement. Il travaille en grande partie à domicile. Je me suis moi aussi aménagé un emploi du temps pour être beaucoup plus disponible. Pas question de repartir au boulot comme avant, ni de cumuler les activités extérieures . A presque 44 ans, il y a peu de chances que j'ai un autre enfant et je tiens à profiter de ma fille au maximum, l'allaiter le plus longtemps possible et profiter de la vie et de la nature avec elle et son papa. C'est une petite fille très calme et facile, donc nous avons vraiment de la chance. Ou bien est-elle facile parce que nous sommes justement détendus ?...
Avec le recul, je pense que c'était à la fois le fruit de deux parcours individuels singuliers, d'une histoire d'amour très forte et d'une foi inébranlable dans la vie. D'ailleurs, notre fille se prénomme Lucie, qui vient de lux, la lumière en latin.
Quant à ma fille aînée, elle vit dans une autre région avec son père et sa belle-mère ainsi que leur fils, son demi-frère. Nous avions une relation un peu distante depuis quelques temps et on peut le dire, conflictuelle : l'annonce de ma grossesse nous a rapprochées et permis de renouer une relation plus apaisée.
Comment vais-je gérer les liens avec ces deux enfants ayant un grand écart d’âge ? C'est encore tôt pour le dire car ma deuxième vient d'avoir 1 mois. Mais je pense que la grande, en "perdant" son statut de fille unique pour sa maman et en accédant à celui d'aînée, va être amenée à jouer un rôle de guide auprès de la petite et cela va créer une nouvelle dynamique familiale.
Enfin, si je n'avais qu'un conseil à donner aux futures mamans qui hésitent à s’engager dans une nouvelle maternité ? D'écouter d'abord leur cœur et de suivre leur instinct. Il n'y a pas meilleurs conseillers ! Et aussi d'avoir un conjoint solide ou un entourage proche qui les soutient. Le reste n'est qu'aménagements et adaptations".
Diapo : Le pacte des futurs parents : les sujets essentiels sur lesquels il faut se mettre d’accord