11 août 1979 - Led Zeppelin au Festival de Knebworth - Rolling Stone
En ce mois d’août 1979, Led Zeppelin vacille sur un fil tendu, entre le maintien et la chute. Mais le groupe montrera, le temps d’un concert inespéré, qu’il a toujours la classe
11 août 1979 : Led Zeppelin a joué son tout dernier concert au Royaume-Uni lors de son passage à Knebworth. Le festival s’est déroulé du 4 au 11 août. Flashback…
Le Crépuscule des Dieux apporte toujours de mauvais présages sans même évoquer les côtés sombres inhérents qu’il est difficile de contrôler. Autrement dit, avant de se transformer en trou noir, une étoile atteint toujours le maximum de sa luminosité. Métaphores mises à part, en août 1979, Led Zeppelin reste considéré à l’unanimité des fans, comme une espèce éteinte et étrange, appartenant à une autre époque.
Train de marche
L’Angleterre à cette époque vient de subir l’assaut du punk et de la new wave, des genres musicaux créés précisément pour effacer ce Zeppelin omniprésent durant les dix années précédentes et oublier ces interminables solos et toute forme de complexité musicale. Mais le soir du 4 août de cette année, 200 000 personnes viennent assister au sabbat jamais mis en scène et ordonné par les des plus grands sorciers du genre – un rite païen au cours duquel Led Zeppelin, alors sur le déclin, atteindra une fois de plus les sommets vers lequel ils avaient poussé le rock avant leur implosion.
Ils n’avaient pas joué dans leur Angleterre natale depuis quatre ans. Quatre années difficiles. La lente érosion des relations personnelles, un « train en marche » de plus en plus difficile à faire rouler, le feu croisé des critiques musicaux et des fans de la première heure. Sans oublier les flèches empoisonnées de leurs collègues. Et enfin, leurs derniers albums, qui n’atteindront jamais les hauteurs de l’âge d’or du groupe.
Bref: ce n’était pas gagné d’avance. Mais tout sera effacé durant ces trois heures au cours desquelles, dans la campagne anglaise, Led Zeppelin montrera au monde leur pouvoir et leur classe insurpassable. Le concert de Knebworth sera répété méticuleusement. Dès la fin de juillet, le groupe jouera deux soirs consécutifs au Théâtre Falkoner à Copenhague : pour ces répétitions générales, les fans danois utilisés comme cobayes, testeront la playlist de leur futur set au Royaume-Uni. Puis les Jimmy, Robert, Bonzo et John s’enferment dans un studio de cinéma pour travailler sur la scénographie générale du concert. Ils se rencontrent ensuite à nouveau l’après-midi du 4 août pour un rapide soundcheck.
Symphonie électrique
Dès leur entrée en scène, les premières notes de « The Song Remains the Same » sont couverts par un rugissement surhumain. Les anciens et nouveaux fans rendent hommage aux quatre pionniers du hard rock. Robert Plant dira plus tard qu’il ne pensait pas que Led Zeppelin puisse jouer encore assez bien pour satisfaire les attentes du public. Il lui faudra la première moitié de la soirée pour se rendre compte qu’il est là, sur scène et que tout cela se déroule vraiment – même s’il pense que sa voix est étouffée par la nervosité.
Qu’ils y croient ou non, quelque chose de magique est en train de se passer. Remettez le DVD du concert dans le lecteur et après l’écoute obligée de « Black Dog », « No Quarter », « Since I’ve Been Loving You » et « Kashmir » passez directement au solo de Jimmy Page juste avant « In the Evening ». Le guitariste et son archet, dans une pyramide de lasers. Une symphonie électrique, dense explorant un territoire musical sombre, tout simplement destiné être indexé dans annales du rock. Et ce, avant même de mentionner la chanson finale, une version dévastatrice de « Communication Breakdown ».
Terminus
Le voyage de Led Zeppelin prendra fin cette nuit. Leur manager ne pourra plus gérer les affaires du groupe, à causse d’une dépendance trop forte à l’héroïne. La friction croissante entre les membres du groupe, suivi par la mort de John «Bonzo» Bonham, condamneront Led Zeppelin.
Ils quitteront la scène rock et entreront immédiatement dans la légende. Et après ce dernier concert anglais fêtant leur retour, une hommage qui se tiendra le 10 Décembre 2007, à l’O2 Arena à Londres pour ce qui reste aujourd’hui – et avec toute probabilité, restera – la dernière apparition du groupe. Un petit jeu: comparez les deux versions de « Stairway to Heaven », celle de 1979 à Knebworth et celle de 2007. Et vous réaliserez que le temps qui passe et l’histoire ne font rien contre ceux qui, même pour un instant, grâce à la musique, se retrouvent à la recherche d’un autre monde, intemporel, dans une dimension.
Pour cette raison, il est nécessaire de revenir en arrière et d’écouter et de regarder à nouveau Led Zeppelin afin de comprendre combien un riff de guitare peut être dense et en dehors des règles de temps.
Belkacem Bahlouli